Le Christ est-il définitivement mort et enterré ? ...
Depuis près de deux mille ans, celui qui ne fait désormais plus mystère pour nombre d'occidentaux, fut crucifié, encore et encore, de moultes manières, par les "siens" en premier lieu, avant d'être jeté à la fosse commune réservée aux croyances du vulgaire, en compagnie de ceux qui n'existèrent que trop longtemps dans l'imagination collective, au goût des philologues, ces nouveaux hommes de loi ! ...
Il y a fort à parier que ceux qui nous succéderons à la surface de Gaïa, caractériseront notre époque, non comme celle qui découvrit le pouvoir de destruction de l'atome, mais comme celle qui inventa le "cimetière de ceux qui n'ont jamais existé" !
Accessoirement, afin d'atténuer la sidération de ceux qui n'ont pas perdu tout espoir, constatons que cet étrange visiteur temporel, ne s'y trouverait pas en mauvaise compagnie, si l'on considère cette assemblée improbable d'êtres qui, à son instar, sont réputés n'avoir jamais vécu !
La liste est longue de ceux que nos déconstructeurs distingués firent monter sur la charette depuis que la Terreur s'est vue privée de tribune ! ...
On y aperçut du beau linge, avant que d'être maculé de sang, mais voyez par vous-mêmes : Zoroastre, Abraham, Moïse, Homère, Shakespeare, sans compter un rétrogradé de fraîche date, qui ne passa pas l'épreuve du XIXème siècle, un certain Jésus, à l'état civil ! ...
Désenchantée, autodestructrice, notre époque apparaîtra à ceux qui auront survécu comme celle des fossoyeurs, des déconstructeurs, alors qu'elle était attendue, à bas-bruit certes, mais depuis des millénaires, comme devant mettre fin à l'âge sombre !
Ceux qui, au fil des siècles, chuchotaient cette future bonne nouvelle, avaient coutume de rappeler aux impatients que l'ombre est à proportion de la lumière ...
Tentons ensemble de voir ce qu'il en est de ce pas de deux dont la chorégraphie nous semble décidément inaccessible ! ...
Il y a tout d'abord cet effondrement de l'Eglise qui, non contente d'avoir trahi de mille manières Celui dont elle fit son fonds de commerce, tente de l'associer à sa débâcle, à tout le moins ne proteste pas quand nos représentations bousculées font ce délétère amalgame !
Sauf erreur, c'est pourtant bien elle qui conçut et imposa l'épreuve de la confession au pauvre bougre comme au puissant, ce concurrent potentiel ! ...
Voilà pour l'ombre !
Alors, qu'en est-il de la lumière qui s'avance derrière ce signe avant-coureur ?
En réalité, si l'on en croit la sagesse du gnomon immatériel, elle était déjà là, mais elle fut retardée, mise sous le boisseau, dès l'irruption des usurpateurs; quand bien même ils ne sont pas tous à mettre dans le même sac !
Il s'agit bien là d'un autre mystère, mais, step-by-step ! ...
Nous l'avons vu sur La Porte des Lions, une fois adoubée par l'empereur romain au début du IVème siècle, "l'Eglise de pierres" s'est empressée d'oublier les évangiles, notamment ces deux passages terriblement "gênants", où l'on voit tout d'abord le Galiléen sortir de ses gonds, admonestant sévèrement les pharisiens, ces hypocrites avides de pouvoir qui n'ont pas fait le job, ont confisqué le savoir, et cet autre où il prédit à la Samaritaine que la relation au divin ne se fera plus sur la montagne sacrée ou dans le temple, mais pour chacun, dans le calme de son for intérieur, en esprit, sans intermédiaire ...
Empêché trop longtemps par les prévaricateurs, ces nouveaux pharisiens, ce temps est enfin venu, c'est évident !
Cependant, entre-temps libérée des arguments d'autorité, de la sourde et pesante menace installée, l'ambiance a changé !
Désormais, chacun décide de sa vie selon son humeur : pourquoi ne pas se consacrer à l'instant, aux menus plaisirs, subtilement abandonnés ici et là par cette vie de douleur et d'impermanence, ou, d'humeur légère, faire son marché aux étals alléchants des spiritualités exotiques, ou bien encore, à l'instar de l'étrange Saul de Tarse, le prématuré, prenant date par cette énigmatique parole : "Christ en moi!", affichant la décision solitaire d'un retour librement consenti !
"Christ en moi !"
Trois mots qui valent mieux qu'un long discours, longtemps et sournoisement culpabilisant, car, de deux manières, ils parlent de notre liberté !
Le "moi", d'apparition récente, nous l'avons oublié, contribua, dès son irruption dans le psychisme de l'Homme, au desserrement progressif de l'infantilisante, de la déresponsabilisante emprise du monde spirituel ...
Sur la Porte des Lions, nous avons souvent observé cette métamorphose là où elle est bien documentée, en Grèce, quelque part entre Homère et Socrate !
La vocation cosmique de notre entité est la liberté - n'en déplaise à tous ces clercs si peu clairs ! -, c'est le vrai sens de la Genèse !
Cela, au nécessaire risque de l'oubli de notre véritable patrie !
"L'exil occidental" pointent les soufis perses depuis Sohrawardi; oubli létal à terme, dont chacun peut néanmoins s'affranchir par une libre décision ...
Sans cette possibilité, sans ce choix fondamental, point de liberté !
C'est le sens de "Christ en moi!" ...