Quand l’énigme quantique éclaire notre propre mystère !

Autant se l’avouer, le seul mystère qui nous intéresse vraiment reste le nôtre, et toute investigation de ce que nous appelons le réel, n’a d’autre but que de nous conférer quelque point d’appui, quelque réalité, fut-elle fugitive !

Il n’est pas question de rappeler ici ce que tout le monde sait, ou presque : nous sommes composés d’atomes !

Ni même d’exhiber ce paradoxe peu fréquenté depuis deux siècles : si nos yeux pouvaient nous rapporter tout ce qu’il se passe dans l’infrarouge, celui qui, il a un instant encore, nous semblait terriblement niais, nous apparaîtrait soudain rayonnant ! …

Apparemment, la physique quantique n’a pas l’Homme pour objet, mais des objets pour l’Homme !

Qui pourrait lui en vouloir, car c’est à cette seule condition que les utilitaristes qui nous gouvernent leur accordent quelques subventions ?

Se voulant exacte, qui ne pourrait la comprendre lorsqu’elle refile cette patate chaude aux approximatifs de l’anthropologie ?…

Il est vrai que cette dernière, un peu comme la physique du XIXème siècle, sa contemporaine, se contente souvent de ce qu’elle voit, de ce sur quoi elle peut raisonner, l’expérimentation en moins.

C’est vous dire sa disqualification congénitale, son peu d’intérêt pour l’évolution oubliée du psychisme de l’Homme !

La doxa positiviste, augmentée du suprématisme occidental, lui avaient interdit l’accès à ces mines à ciel ouvert que sont les mythes, les symboles, les très anciennes spiritualités orientales, témoins jamais convoqués, d’une mutation, d’un saut qualitatif, tels, que ses ethnologues distingués en auraient perdu leur latin, n’auraient su décrire ce qui n’entrait dans aucune de leurs catégories …

Avant d’établir l’apport involontaire de cette science éruptive, disruptive, à l’histoire occulte de l’humanité, observons dans un premier temps la manière dont les génies convoqués au début du XXème siècle, se sont affairés autour d’une créature étrange, soudain surgie des abysses de notre conscience, de cet étrange "fond sans fond" des mystiques, et qui ne se laissait prendre que dans le filet des équations …

La relativité générale est-elle en passe de figurer au rang des particularités exotiques ?

C’est dans l’ordre des choses, tout comme les dieux de l’Olympe, désormais oubliés, leurs ancêtres philosophes, en voie de l’être, les physiciens sont des tueurs !

S’étant imposés toutefois, avant de tuer le père, l’épreuve des preuves …

Ce qui manqua cruellement dans les duels qui opposèrent les premiers physiciens, rebaptisés philosophes, mais leur assure paradoxalement une forme de survie.

Ainsi, est-ce un signe des temps, Platon, longtemps écarté par la doxa aristotélicienne, fut récemment remis à l’honneur par Roger Penrose, prix Nobel de Physique ?...

A ce dernier, mais tout le premier, l’idée que "le maître de ceux qui voient" se faisait des Idées, ne paraît plus fumeuse !

Ajoutons qu’avec un peu d’imagination, et si l’on sait discerner les télescopages silencieux, les expériences du LHC pourraient avoir lieu dans la Caverne !

La relativité générale a ceci de particulier qu’elle se fissure dès lors qu’on la confronte aux autres galaxies qui, il est vrai, n’existaient pas, ni dans le savoir, ni dans la pensée d’Einstein !

Alors, pour combler cette béance, on prit ce que l’on n’avait pas sous la main : la matière noire !…

Ce constat, apparemment désinvolte, pour dire que le mystère s’éloigne au fur et à mesure de notre avancée, mais ce qu’il cache plus encore, c’est que sa nécessaire inaccessibilité n’a d’autre ambition que celle de nous construire, chose impensable pour les formatés que nous sommes, pour les pourfendeurs de la cause finale, avant qu’un génie, non engoncé dans le qu’en dira-t-on des bigots de la science, comme dans la logorrhée de ceux de la chaire, s’empare de cet impensé !

Si l’on ajoute le manque de respect au bon sens de la part de ce monde que nous ignorions encore il y a peu, mais qui semble, lui, ignorer la plus élémentaire des politesses, le temps semble venu où s’effondre la logique qui nous accompagna vaillamment pendant ces deux derniers millénaires ! 1

Cependant, le tandem du couple "sens et raison" a encore plus d’un tour dans son sac, par vitesse acquise, dirons-nous !

Seul le semblable peut connaître le semblable !

Habituellement réservée aux initiés, aux mystiques, aux amateurs de mondes invisibles, cette sentence énigmatique, pour peu qu’on l’exfiltre de son ghetto métaphysique pour la mettre au travail dans ce nouvel inaccessible que constitue la structure intime de la matière, s’avère féconde, tant l’invisible résonne différemment en fonction de celui qui raisonne !

Un exemple emblématique : l’atome !

L’avez-vous déjà rencontré ?

Non ! mais soyez rassurés, aucun physicien non plus !

Tout au plus, chacun s’en fit une petite idée !

Le premier, vraisemblablement gourmand, se le représenta comme un "plum pudding", avant que très vite, ce détour culinaire ne comptât pour des prunes !

Enfants gâtés que vous êtes! ... vous n’en vouliez pas pour l’atome, ce n’est pas grave, le moment venu, on vous le resservira lorsqu’il s’agira d’imaginer l’expansion de l’univers ! …

Pendant que les uns s’affairaient en cuisine, un contemplatif prenait le frais sous la voûte étoilée ; fécondé par la vision copernicienne, il imagina alors, un système planétaire !

Morale de l’histoire : cette représentation noyau-centrique a la peau dure puisqu’elle est toujours nôtre ! …

Le risque encouru étant qu’un électron se trompe de trajectoire ou plus exactement, obéisse à son "instinct", et ne vienne s’écraser sur le noyau !

Cet accident, jamais observé dans les annales des assurances cosmiques, n’est pas banal, puisque, s’il se produisait, vous ne seriez pas là pour lire ces quelques lignes, et moi pour les écrire !

C’est alors que vint l’allumé, du moins aux yeux d’Einstein, Niels Bohr, qui voyait dans toute cette agitation occulte, mais soigneusement, pour ne pas dire "mystérieusement ordonnée", le moyen que la lumière avait de s’autoproduire !

Le bal des prétendants à la représentation ultime battait son plein, lorsque survint la deuxième révolution quantique !

Superposition, intrication, non localité, le regard se détourna de la particule, fugitive, instable, indéterminée - coincée en quelque sorte, un peu comme nous, entre un apparaître et un disparaître ! -, pour se porter sur un champ immense où elle prendrait ses aises, que nulle loi, nul géomètre, nul représentant du fisc, ne sauraient enfermer dans un quelconque espace, obéissant à la seule et indocile interdépendance si chère à nos amis bouddhistes …

Un peu comme si elle n’était au fond que la manifestation locale et fugitive d’une source éternelle !

Ici, il nous faut faire halte !

Ce qu’il vient de se passer en l’espace d’un siècle est inédit !

Cela semble pourtant avoir échappé aux anthropologues, toujours occupés à gratter le sol ou à presser le citron d’un structuralisme en péril, à se rassurer avec des invariants fantasmés …

Sur le plan psychique, tout ce qui survint il y a plusieurs millénaires, puis s’était attardé, le temps d’une construction, le temps que nous devenions ce que nous sommes, est bousculé, mis à mal, contraint de céder la place !

En deux mots !

La première révolution quantique a déboulonné la statue du commandeur, ce "bon sens" enjôleur, subrepticement hissé au niveau d’un absolu, et partant, mis fin à l’exclusivité de ses géniteurs, le couple "observation/raisonnement", marié par Aristote pour le pire et le meilleur !

Bien après Galilée, qui osât, tout le premier, remarquer le pire, elle contribua, tout bucher éteint, à rabaisser le caquet d’une prétention vieille de près de 2 400 ans !                                  

Mais, comme s’il n’y suffisait pas, la deuxième révolution quantique nous permet - ce n’était pourtant pas sa vocation ! -  d’envisager un passé plus ancien encore, un état de conscience où nous ne subissions pas la dictature des apparences ! …

Qu’est-ce à dire ?

Depuis qu’il s’est accaparé la direction des affaires, notre regard physique se déplace d’un phénomène à l’autre, dictant sa loi à un cerveau alors labile, près à toutes les aventures pour exister ! …

Avant ce coup d’état plus ou moins soft des sens, ces suborneurs malicieux, la pensée conceptuelle rongeait son frein sous l’horizon de l’univers !

Quel besoin aurait-il eu, cet homme d’avant, de concevoir quoi que ce soit, dans la mesure où sa conscience, dont il n’avait pas conscience, fluait à son aise dans le mystère qui ne faisait pas mystère, dans le monde des phénomènes qui ne s’était pas alors retiré dans "son quant à soi", nous laissant patauger dans le liquide amiotique du "quant à moi", avant d’être expulsés de cette étrangeté que nous appelons la "chose en soi" !

Cette période d’intense mutation, nous l’avons oubliée, volontairement, et involontairement !

La Porte des Lions a souvent abordé cet instant décisif de notre évolution, ainsi que les raisons qui font que nous n’en avons plus souvenir !

Aussi, après un bref rappel, en bas de page 2 , des traces qu’il nous reste de cette métamorphose qui fit de nous ce que nous sommes, attardons-nous sur un exemple emblématique de notre anachronisme, de notre superbe, mêlée, comme il se doit, d’une ignorance crasse, qui font que, quel que soit le bricolage qui nous tient lieu de certitude, notre dernière naissance se fit sous X ! …

Le terrible et narcissique malentendu !

Généralement, selon les représentations que l’on nous imposa, l’histoire de la philosophie grecque démarre avec les premiers physiciens, que l’on n’appelle pas encore "philosophes" !

Thalès, tout le premier, qui eut le mérite à nos yeux, de tenter une explication des phénomènes en se passant des frasques des dieux de l’Olympe …

En résumé, pour ces hommes, tous issus des écoles de mystères, tout ne se décide pas, ne peut se décider, dans cette foire d’empoigne céleste qui avait pourtant toujours l’heur de plaire au peuple …

C’est, avant de devenir un concept, leur sentiment révolutionnaire, issu des initiations : il est une loi supérieure à ceux qui voudraient la faire et nous ressemblent par trop !…

Cette loi a quelque chose à voir avec "le vrai et le beau" !

Et, accessoirement, avec notre toute nouvelle faculté d’abstraction qui ne fait pas forcément à l’époque, l’objet d’une prise de conscience !

A l’issue de cette recherche balbutiante de l’Un, apophatique avant l’heure, et que notre représentation squatte et apauvrit en la nommant scientifique, il lui semble évident que tout vient de l’eau !

Rangeons nos sarcasmes, nous qui n’avons de cesse de mettre au point la théorie du tout ! …

Dans la représentation qu’il a de lui-même, l’occident s’est attardé à ce qui lui semble être une ébauche de discours scientifique, pour, tout à la fois - le beurre et l'argent du beurre ! - l’encenser et dénoncer cette naïveté primitive qui projette une lumière aveuglante sur notre intellect désormais rayonnant !

Au fond, tout comme notre ancêtre le singe, né dans l’idéologie des interprètes de Darwin, ces premiers physiciens ne témoignent-ils pas, à leur manière si touchante, de notre splendeur ?

Ne seraient-ils pas les mêmes, ceux qui pourfendent l’idée de cause finale, et s’autoproclament cerise sur le gâteau ?

Ces hommes que l’on ravala au statut de présocratiques, n’étaient pas encore tout à fait, comme nous, dénaturés, séparés !

Comme nos actuels concepts doivent, quoi qu’on en dise, énormément à nos croyances, les leurs devaient tout à leur nature, à leur ressenti, à leur tempérament, à ces tempéraments, qu’hier encore, l’on caractérisait par l’un des quatre éléments constitutifs de notre berceau terrestre…  

Quand Thalès dit : tout vient de l’eau ! il ne plaque pas, comme nous le ferions, un concept sur une expérience de pensée qui serait détachée de ce qu’il ressent profondément, à savoir l’action de l’eau en lui comme dans la nature … 3

Cet oubli de notre mutation psychique, de ce que nous sommes désormais des êtres "dénaturés", au sens premier du terme : issus d’un mélange où la conscience de soi nous coupa toujours plus de la nature, extérieure et intérieure, nous a conduit à éprouver, à la place de ce qui devrait être un émerveillement devant le mystère de notre gestation, un orgueil imbécile !

Et, puisque l’heure semble être à la déconstruction, il me semble que ce chantier est prioritaire !

 

 

 

1 Voir l’intervention de Jean-Marc Bonnet-Bidaud, astrophysicien au CEA, en page 41 du numéro 212H de Sciences et Avenir, janvier/mars 2023.

2 Plusieurs grands mythes grecs nous parlent de cette épopée de la conscience : pour la fragmentation et l’individualisation de sa forme première "collective": la mise en pièces de Dionysos Zagreus;  pour le rapport toujours plus prégnant de l’âme et du corps : le rapt de Perséphone;  de l’âme et de l’individu : Ulysse et Pénélope, Orphée et Eurydice, "Hélène et les garçons !"…

Un peu plus à l’orient géographique, dans une épopée qui n’avait alors pas vocation à être publiée, la désormais "célèbre" Bhagavad-Gîta, Krishna enseigne à son unique élève Arjuna, comme cela se faisait dans les écoles de mystères grecs, et encore chez Platon, une physiologie occulte auquel l’homme n’aura plus accès en raison de ce saut qualitatif de l’évolution.

Il y a aussi cette étrange admonestation du figuier par Christos, quelques heures avant de monter sur la croix de bois mort, passée sous silence par les théologiens ou source d'explications farfelues. Nous avons déjà expliqué en quoi elle signe définitivement la fin de la période psychique annoncée en son temps par Krishna à son élève Arjuna, et dont Gautama dit le Bouddha fut le dernier "bénéficiaire".

Devant nécessairement s'intensifier, notamment lors de l'aventure occidentale, cet assombrissement spirituel explique en partie les raisons de son choix, apparemment "déraisonnable", de s'incarner à ce moment de l'histoire, et à cet endroit occupé par l'empire romain ...

Krishna avait, quant à lui, apporté aux siens la possibilité du retour, de la conversion, au moyen du yoga!

Enfin, pour ceux qui acceptent intuitivement que l’histoire de la philosophie, apparemment erratique, dialectique a minima, est le symptôme d’un enjeu qui disqualifie notre entendement, un essai incontournable : "Les énigmes de la philosophie", de Rudolph Steiner aux éditions E.A.R.

Avertissement :

Cet ouvrage a été écrit par cet homme tout à la fois adulé et controversé, à la différence de ses nombreuses conférences destinées à l'époque à un public averti, et dont les transcriptions et traductions comportent de nombreuses erreurs qu’il n’eut pas le temps de corriger quand il lui fallut se rendre à l’évidence : son enseignement intéressait un nombre considérable de personnes, parmi lesquelles se trouvaient inévitablement quelques détracteurs alléchés …

La lecture de ces conférences nécessite donc une longue pratique de sa vision du monde, afin de déceler les erreurs volontaires, le plus souvent involontaires, qui la parsèment.

A la différence de cet ouvrage majeur sur " Les énigmes de la philosophie", écrit de sa main, maintes fois relu, sur lequel on peut très bien être d’accord ou pas d’accord, mais à tout le moins en présence de  sa pensée précise !

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