Immanence et vide quantique ?
A ceux qui me verraient bien mis à l’index pour ces propos délirants, comme à ceux dont la foi inébranlable exige toujours plus de preuves rationnelles, je dis pouce ! …
Rassemblons-nous mes frères, calmons notre angoisse
existentielle, ôtons d’un geste décidé ces sparadraps que sont nos certitudes, le
temps d’un tour d’horizon sur ce qu’entendirent, virent, et pour finir, pensèrent,
de notre origine, ceux qui nous précédèrent à la surface de Gaïa.
Et, le temps pour nous de dire merde à notre anachronisme,
comme à notre superbe imbécile, ne seraient pas disqualifiés pour avoir été les
premiers en cette démarche …
Ce survol désormais possible, non grâce à l’optimisation du trafic
aérien, mais au récent désenclavement du savoir, nous emmènera au fil des
millénaires, d’une très ancienne science spirituelle hindoue, jusqu’à la mer de
Dirac ! …
Cette mer inconnue des estivants, que l’on ne peut
apercevoir depuis l’espace, mais qui en dit long sur ce dernier, éternel
mutique, source d’incessants bavardages …
Mais entre ces deux destinations ignorées des touristes du
savoir, point question de s’affranchir d’une halte au pied de l’Apeiron du grec
Anaximandre, ce présocratique qui débaptisa les forces à l’œuvre pour se faire
mieux entendre de ceux qui n’entendaient déjà plus rien aux exploits des olympiens,
devenus tout juste des noms, rien que des noms, qu’on aurait tôt fait d’oublier
… 1
*
* *
Mais avant d’entamer ce curieux périple, que disait-on du
vide ici et là, avant que très récemment, il ne devienne mode, drapé dans le
mystère quantique ?
Il fut longtemps dit dans les milieux autorisés que la
Nature en avait horreur, consacrant ainsi la décision irrévocable de ceux qui s’étaient
finalement décidés pour ce qu’en disait leur observation.
Mais, en catimini, dans les milieux où l’on se contente de vivre,
laissant les phénomènes aux dieux qui s’y promènent, le vide, c’était avant
tout pratique !
Cet endroit magique où l’on pouvait se débarrasser de
quelque objet provisoirement inutile ; ce lieu de mémoire où l’on peut confier
un moment de notre vie à l’oubli, c’est le vide poche !
Ça, c’était avant, avant que l’on ne fouille nos poubelles
pour savoir qui nous sommes, au moins qui nous ne sommes pas, puisqu’elles ne
parlent que de nos comportements qui visent bien souvent à combler un vide…
Transposé dans l’histoire de la philosophie et de la
physique, le vide, bon prince, a toujours accueilli nos spéculations, d’autant
plus hasardeuses qu’on le savait muet !
On y trouve donc un peu de tout, quelques disputes à
l’ancienne qui, pour avoir été bien menées, sont devenues incompréhensibles,
autant d’objets de réflexion n’ayant plus d’objet, deux ou trois représentations
obsolètes, des expériences de pensée abandonnées, tout cela oublié, au moins le
temps que toutes ces tentatives ne resurgissent du passé sous notre main devenue
fébrile, nous imposent, par leur présence insolite, ce dont nous n’avions plus
mémoire …
Désormais, ayant migré des grands espaces au plus intime de
la matière – de celle dont nous sommes faits, par conséquent ! - il revêt une
importance telle qu’il faut la taire, l’étouffer sous les indigestes équations,
car sans lui, peut-être n’existerions-nous pas ? …
Alors, qu’en est-il du petit dernier : le vide
quantique ?
La meilleure métaphore permettant d’accéder à cet abîme,
sans trop y perdre pied, est celle qui décide qu’il s’agit là d’un "prologue" de
la matière ! 2
L’image est parlante qui nous permet de ne pas trop nous
inquiéter de cet état léthargique des particules, dont l'énergie négative,
inférieure à la masse vitale, les dissuade d’apparaître sous les
sunlights, sauf à recevoir de ce monde où tout sauvagement s’agite, une dose d’énergie
propre à les propulser dans nos représentations, fut-ce de manière furtive
…
Pour le dire autrement, le vide quantique, énigmatique, est
plein de tous les possibles, mais, entre deux jaillissements, du grand big bang
au petit dernier, ce nouveau départ de l’inflation cosmique, il semble rester indécis, "virtuel",
disons-nous pour nous ménager un instant de réflexion !
Pour Parménide, impatient d’en découdre avec ce qui pourrait
entraver la nouvelle logique, ce concept n’aurait pas fait long feu et, à tout
le moins, n’aurait pu générer quoi que ce soit, puisque "le non être n’est pas !"
Qui pourrait dire le contraire ? … ne prit-il pas le soin d'ajouter, puisque l'intelligence nouvelle était le seul rapport au monde alors envisageable …
Il semble bien d'ailleurs qu'elle ait pris goût à ce confort !
Pour les très anciens hindous, incapables d’une quelconque spéculation, à l’époque où celle-ci attendait son heure sous l’horizon de l’histoire, privés
d’équations, mais dotés d’une clairvoyance dont nous sommes désormais privés,
l’univers se résorbait régulièrement dans un Pra laya, cet état où tout reste en
mémoire puis se redéploye sous une autre forme …
Pour Platon, s’il nous revenait, la joie serait grande de
constater que l’intelligence des hommes a fini par déchirer l’écran de la maya
pour décrire cet état de l’univers où, selon sa vision, gisait le dieu
ensorcelé …
Pour le Christ, promis au mystère de la croix, l’heure, il le savait, n’était plus de se faire comprendre, les hommes du temps de Jésus ne s'étaient pas reconnus en celui-ci, mais de
se faire entendre de ceux à venir : « Cet univers passera, mais mes
paroles resteront ! » 3
Nous sommes allés voir chez Larousse la signification de "prologue", mot polysémique s’il en est, et avons retenu celle-ci : Partie d'un ouvrage dramatique où sont
exposés des événements antérieurs à ceux qui se déroulent dans la pièce
proprement dite.
Puis, pour se faire une opinion sur une époque où les hommes
n’en avaient pas encore, nous nous sommes remémorés les paroles révélées du
Rig-Véda : « Il n’était alors ni être, ni non être ! »
Cette double négation nous rétro propulsa dans le temps et dans
l’espace, vers ces néoplatoniciens du début de notre ère, qui tentèrent une approche négative, dite apophatique, du mystère de Dieu …
Ce qui avait été entendu devait être désormais compris !
L’Ether
Bien que celui-ci, depuis près de trois mille ans, vague souvenir d'une époque où les hommes savaient, sans savoir qu'ils savaient, ait tenté d’éclairer d’une lueur incertaine les hommes devenus pauvres en esprit 4, Einstein décida qu’il ne jouait en réalité aucun rôle dans la propagation de la lumière …
Aussi l’abandonna-t-il avec ce qu’il estimait être des croyances
du passé : les forces, l’action à distance, la non-localité etc. dans un lieu
de collecte des encombrants où il nous faudra un jour prochain, aller rechercher
nos racines.
Il ne lui serait pas venu à l’esprit que cet éther, du moins
ce à quoi il ne l’avait pas réduit, était aussi en lui, était précisément à l’origine de son
cerveau, ce miroir, devenu au fil de millions d’années, ultra sophistiqué, dynamique,
et qui lui permettait désormais de percevoir l’univers sous cette forme géométrique
qu’il restitua à ceux de ses contemporains capables de se représenter
le monde de cette manière.
Le problème n’est pas qu’une représentation soit vraie ou
fausse, ce qui compte c’est ce qu’elle fait de l’homme à un moment donné de son
évolution !
Le langage humain, ce sculpteur plus ou moins discret, n'est pas non plus figé !
A entendre la communauté des physiciens, il semblerait bien
que le temps de la relativité générale soit compté, et si c’est bien le cas, on
oubliera malheureusement très vite tout ce qu’elle apporta au psychisme de
l’Homme …
Du temps de sa splendeur qui s’achève sous nos yeux, il est
vrai que l’on ignorait déjà ce que lui doit un objet devenu quotidien, comme le GPS …
Les égyptiens de la basse époque, à part quelques-uns
d’entre eux, avaient également oublié le savoir secret permettant d’édifier les
pyramides.
La paradoxale utilité de la physique quantique !
Contrairement à ce que chacun espère, elle ne réside pas
dans l’exhumation prochaine de l’origine du monde, aboutissement fantasmé, orgasmique,
de cet interminable strip-tease objet de tous nos désirs, mais dans son
paradoxal pouvoir de nous aider à reconsidérer des savoirs oubliés, ensevelis
jusqu’alors sous les ricanements nerveux de notre bon sens autoproclamé …
La boucle nécessaire ouverte par Socrate est sur le point de
se refermer, et Nietzsche, s’il avait choisi de s’incarner dans un avenir qui désormais
ne saurait tarder, aurait moins souffert !
Mais le karma a sa raison que la Raison ne connaît
pas !
Ainsi, avec le vide quantique, l’Ether est en train de
réinvestir un domaine dont notre intelligence l’avait chassé …
Soyons concrets : si nous avions osé parler d’un corps
éthérique aux enfants de Darwin, ils auraient crié au blasphème !
Mais enfin, vous n’y pensez pas - se seraient-ils
écriés ! – pourquoi, tant que vous y êtes, ne pas affubler le dieu singe,
notre ancêtre vénéré, d’une aura, d’un bonnet phrygien ou bien encore de la
couronne de la statue de la liberté ?
Il est vrai que les enfants de Darwin ont fait des petits,
et qu’il en traîne encore un certain nombre dans les allées du pouvoir …
pardon, du savoir !
Et, si un physicien les informe que le vide quantique est en
nous, ils restent de marbre, voulant ignorer que celui-ci est sauvagement agité
en son intimité …
Ce qui tendrait à prouver que deux des nôtres au moins,
avaient échappé, pendant qu'il en était encore temps, à la dictature rétrospective du visionnaire des Galapagos;
j’ai nommé Héraclite, et un peu plus tard, Plutarque, qui avaient déchiré le
voile de la maya, sans l’aide d’aucune équation et avec cette certitude ancienne
qui se passait de toute expérimentation.
S’ils pouvaient nous parler, ils diraient aux promoteurs du
LHC que le rayonnement cosmique, pour qui a encore la chance de le voir en
esprit, est mille fois plus puissant et ô combien plus écologique !
Mais ils ajouteraient, magnanimes, qu’il faut bien que
jeunesse se passe, et que les rejetons du vingtième siècle et suivants doivent à
leur seule intelligence la modélisation des premières pièces du puzzle !
Peut-être ajouteraient-ils, pour tenter d’entrer en contact
avec nous, qu'il est urgent de remettre la véritable évolution en perspective ! …
La question de savoir si Dieu est immanent ou transcendant, est-elle humaine, trop humaine ?
A moins que, tout simplement, elle ne soit qu’occidentale, superfétatoire,
lointain résultat du débat qui opposa deux hommes au psychisme différent …
Platon, le maître, et Aristote, l’élève qui devint le maître
de ceux qui savent !
C’est dire que nous n’avions plus le choix, il fallait donc honorer
celui que nous étions capables de comprendre …
Le premier, dernier des initiés, voyait encore l’Idée hors
de la chose, mais l’élève qui ne l’entendait pas de cette oreille, fit école
auprès de tous ceux qui, comme lui, mutatis mutandis, confièrent à la Raison ce
qui n’était plus perçu en esprit !
"L’idée", attrapée au lasso de la Raison, rebaptisée "la chose
en soi", n’était donc plus objet de vénération, mais d’étude …
Si l’on considère notre Liberté comme moteur de l’Histoire,
ce putsch conceptuel n’était-il pas nécessaire ?
Loin, très loin des débats houleux qui accouchèrent de
l’Occident, une voix se fit entendre timidement, si timidement qu’elle n’est
pas encore parvenue aux oreilles de nombre des enfants du soleil couchant :
« Je suis en toutes choses, mais aucune chose n’est en Moi ! »
Ainsi, Dieu serait non local, ôtez-moi d’un doute, cela
dépasse l’entendement !
*
* *
Avant, bien avant que l’évolution ne se décide pour la cécité créatrice d’Aristote, pour les anciens hindous, la question ne se posait pas en ces termes : ceux qui avaient reçu le Veda, le transmirent oralement aux quelques attardés dont les oreilles pouvaient encore entendre, bientôt relayé par la tradition orale, puis écrite, quand ils s'aperçurent qu'ils n'étaient plus qu'une poignée et qu'il était temps de quitter la scène...
En laissant toutefois quelques traces du drame qui venait de s'y dérouler ! ...
Mais bientôt advint une nouvelle génération de mutants, qui
entreprit d’accommoder ce qui lui restait de clairvoyance avec une approche nouvelle,
rigoureuse, méthodique, en un mot scientifique, à une époque où la philosophie
grecque n’avait pas même commencé de se dégager lentement de la pénombre des mystères.
Cette science spirituelle a pour nom Samkhia !
Elle est essentiellement une observation de la génération, puis
de la procession des âmes à partir de ce que l’on pourrait appeler une mer
immatérielle, un flot spirituel, jusqu’aux phénomènes qui agitent le monde
sensible, et parmi eux, celui si singulier, phénoménal qui interroge et
s’interroge : l’Homme.
Pour se faire une idée de ce qu’ils voyaient en esprit, on
pourrait citer Erwin Schrödinger lorsque, dans un tout autre contexte, il
voulut mettre son équation en image : « Ce que nous appelons particule
n’est pas un fragment individualisé de matière, mais une crête d’écume sur un
train d’ondes ! »
En cela il ne disait rien de bien différent de ce que vit
Démocrite, avant qu’Aristote, idéologue au service de la nouvelle logique, ne
falsifie son propos, inaugurant ainsi plus de deux millénaires de quiproquo et
d’errance matérialiste. 5
Dont il faut se dire, si le sens de tout cela est bien la Liberté, qu'elle était nécessaire !
Le plus étonnant dans cette image de l'oriental de Vienne, c’est qu’elle correspond
à une étape bien précise de la procession des âmes, que les observateurs hindous
appelaient "Buddhi", nous y reviendrons.
Je ne sais si cette métaphore a rendu accessible son
équation au commun des mortels, mais, belle comme une équation de Dirac, elle pourrait
débuter notre explication du Samkhya !
A la surface de la mer immatérielle, lisse jusqu’alors, se
forment soudain de petites rides, puis quelques petites vagues qui
s’amplifient, et enfin des gouttelettes, attachées pour un court instant à leur
base. C’est le premier stade de la différenciation (Buddhi).
Mais, pour entamer leur lente procession, cette aventure de
l’individualisation et donc de la Liberté, elles doivent emporter un petit
morceau de cette matrice ("Prakriti" chez les hindous), avec laquelle commence un bras de fer dialectique contraignant sa liberté
d’action.
Le Samkhya décrit, non pas ce qu’est l’âme, elle contient tous les possibles, mais son rapport
avec ses différentes enveloppes, "figure" imposée à chaque étape de la procession descendante, et
jusqu’à l’incarnation, pour ce qui concerne ce phénomène que nous appelons
l’Homme.
Pour revenir rapidement au sujet qui nous occupe, sachons
qu’au processus de différenciation initial vient s’ajouter celui de la condensation, maya qui
eut un tel succès auprès de l’homme occidental, qu’il n'a plus d'yeux que pour son
ultime étape: le corps physique ! …
Les anciens grecs avaient bien vu en images le déroulement de ce drame, c'est le mythe du rapt de Perséphone !
Et pour en terminer, provisoirement, sans trop édulcorer cette
approche globale, ce qui nervure ce que nous appelons le réel, le monde des
phénomènes, ce sont les trois "Gunas" !
Ces trois rapports plus ou moins équilibrés entre l’âme et
son enveloppe, et qui expliquent l’infinie variété des phénomènes, de l’Homme jusqu’aux
couleurs …
Ainsi, un individu dominé par ses sens est en état de "tamas", d'obscurité, quand de cet autre, en état de "sattva", on dit un peu vite que c’est un pur
esprit, alors qu’il est encore parmi nous, quant à cet autre encore, tentant d’harmoniser
sans bruit sa part d’éternité et son enveloppe fugitive, qu’il est en état de "rajas".
Les trois "Gunas", ces trois rapports entre l'esprit et la matière, fut-elle immatérielle, peuvent rendre compte de l'intégralité des phénomènes que nous avons sous les yeux, comme de ceux pour lesquels nous sommes devenus "persona non grata" !
Pour les couleurs, ce mélange de lumière et d’ombre, l’orange des tenues de nos amis bouddhistes correspond, dans le Samkhia, à l’état de "Satwa", quand le violet et le bleu des vêtements sacerdotaux de l’Eglise romaine, correspond à la domination de l’ombre, pour le dire autrement, à l’incarnation.
Mais ceux-là le savent-ils encore ?
L’Apeiron d’Anaximandre
Au XIXème siècle, l’Occident, alors sous emprise d’un Darwinisme d’autant plus puissant qu’il fut condamné par les religieux, fut confronté "par ailleurs" à un univers où la pensée ne s’arrête pas à quelques observations, n’y prend point appui pour régler de vieux comptes, discréditer des révélations par nature plus ambitieuses ...
Cet univers dont on ne savait pas l'existence, c'est cette science spirituelle des anciens hindous, le Samkhya évoqué plus haut, approche globale, phénoménologique, bien avant Husserl, qui décrivait une mer originelle,
immatérielle, où tout est indécis, à l’état latent, potentiel, infini, sans limites,
ni externes, ni internes.
La culture grecque n’étant, à l’époque, pas encore lettre
morte emportée par quelque vent mauvais, on aurait pu en déduire, très
logiquement, que l’on avait sous les yeux, en quelque sorte, l’Apeiron du
présocratique, Anaximandre !
Dans l’hystérie iconoclaste (dont le wokisme n’est qu’une
pâle réplique s’acharnant sur les restes qu’on voulut bien lui laisser), qui disposa
de ce siècle et du suivant, il semblerait que ce rapprochement ait été oublié …
Mais, si cela avait été le cas, comme cela s’imposait aux
représentations des modernes marteleurs de bas-reliefs, on en aurait déduit qu’Anaximandre
le bateleur avait présenté comme sa théorie ce qui n’était qu’une carte postale
retour d’Inde …
Ainsi le voulait la dictatoriale représentation occidentale des
phénomènes qui ne sauraient être, comme chacun sait, que locaux !
Cette même représentation, fille de l’idéologie du bon sens, causa l'insolite retard
du petit Albert, paradoxalement en avance sur son siècle, et vint mourir dans
l’indifférence générale, au début des années 1980, à la lumière du laser dirigé
par un "gaulois" sympathique à la "moustache réfractaire", retranché depuis lors dans un sorte d'anonymat et répondant
au nom d’Alain Aspect.
Il est vrai – qu’il s’en contente ! - que si l’on se
souvient encore de Louis XVI, qui pourrait dire le nom de son bourreau ?
Mais il est une autre source d’interrogation, physique,
métaphysique, et plus utilement encore, anthropologique, dans ce qui aurait pu, à
l’époque où régnaient les philologues et autres dé-constructeurs, nous être
présenté comme un boniment : c’est le spectacle de ces couples d’opposés
qui s’échappent momentanément de l’Apeiron, mais doivent payer cette liberté
provisoire d’un retour rapide à l’indéterminé.
Est-ce, pour ne prendre qu’un exemple, ce défi vital qui
motiva Stanley Kramer pour le choix du thème de son film La Chaîne ?
Et, plus largement, tout bien considéré, une préfiguration
de notre propre vie ?
La mer de Dirac
La mer, toujours et encore, mais il s’agit ici d’une
métaphore ! …
Si l’origine de l’eau sur Terre, la formation des océans et
des mers, reste à ce jour indéterminée, celle de Dirac se forma à partir d’un
continent perdu de vue …
1927 !... résumons cet instant où le psychisme de l’Homme ajoute
une nouvelle couche à sa géologie, la question étant de savoir si celle-ci est seulement cumulative ou interactive …
Bref, l’équation de Schrödinger permettait enfin d’accéder
au mystère d’un monde qui, pour être encore sauvagement agité, ne témoignait
pas moins d’une époque où tout s’était ralenti, bien sagement, afin que des
couples puissent se former, et, prolifiques, engendrer cette
myriade de phénomènes dont l’Homme n’est pas le moins phénoménal.
Mais, quid alors de ce monde qui vit à cent à l’heure,
pardon, à 300 000 km/s, et n’avait pas le temps de faire des petits ?
Alors, Monsieur Paul dessina une belle équation dont il fut
fier dans un premier temps, mais qui s’avéra bientôt cacher un monstre, un
alien qui, comme le diable remis au goût du jour par David Elbaz, avait su jusqu’alors se faire oublier …
Il ne s’agissait rien de moins que d’un univers à l’envers,
de particules d’énergie et de masse négatives …
Pour le dire autrement, de la mer de Dirac, n’était pas sorti
un poisson devenu amphibie, archétype de l’évolution, mais un monde étrange,
celui de l’antimatière qui était sur le point de gagner la partie, quand
soudain ! …
Reste à retrouver Celui qui avait brandi le carton rouge dans ce match à huis-clos, et pour quelle raison que notre raison ignore !
Le vide quantique
Mais tout passe, tout casse, tout lasse, et la mer de
Dirac s’est retirée depuis lors en quelque endroit discret, si l’on peut
dire !
De la mer, nous passâmes aux champs, mais attention, de ces
champs que nul cadastre ne saurait circonscrire, parcourus d’une onde qui
pourrait à la rigueur faire fonction de sillon …
Endroit indescriptible et primordial où l’énergie la plus
basse n’est pas de tout repos, où la fluctuation se fait sans l’ombre d’un
mouvement, et qu’un peu de chaleur pourrait ramener à la vie !
Mais, peine perdue, aucune métaphore ne saurait nous parler
de ce monde, seules les équations … à conditions qu’elles soient belles !
C’est ce que disait Monsieur Paul, qui mijotait longtemps, très
longtemps ce qu’il avait à dire, au point que ses contemporains s’impatientèrent
…
Alors, devant cette hypercomplexité, cette plasticité du
vide quantique, cette soumission muette à nos vues hésitantes, l’énigmatique
Rig Veda, ne deviendrait-il pas soudain plus limpide, plus familier ?
« … Il était alors ni être ni non être …
… le devenir recouvert par le vide était là … »
Parmi les toutes premières paroles de l’hymne X-129 du Rig Veda
1 – Cette laïcisation des forces à l’œuvre n’annonce-t-elle pas la grande crise nominaliste du moyen-âge, qui ne serait somme toute, qu’une réplique à une époque où le Moi, de plus en plus conscient de lui-même, commence à douter de ce qu'il estime être ses productions ? …
2 – formule tirée d’une conférence sur "l’ultime atome", qui
réunissait Etienne Klein et Heinz Wismann le 23 mars 2015. Agora des savoirs -You Tube.
3- "L’évangile de saint Marc" : dix conférences tenues à Bâle
du 15 au 24 septembre 1912 par Rudolph Steiner. Disponible aux éditions Triades
Paris. Cet évangile qui, comme celui de Jean, commence non sans raison(s) au baptême de Jésus dans
le Jourdain, s’intéresse plus particulièrement aux trois ans
de l’incarnation de cette entité qu’en occident nous nommons le Christ. Il est des
quatre, celui qui cerne au plus près la dimension cosmique de ce mystère qu’il
nous faut désormais découvrir !
4 - Les pauvres en esprit cités dans l’évangile, ne sont pas,
comme notre anachronisme et notre indigence pourraient nous le laisser croire, les
laissés pour compte de l’intelligence, mais tout au contraire, ceux qui, comme
vous et moi, sont, par elle, cette activité du Moi, privés d’accès au monde
spirituel, de "la chose en soi" pour ceux que cette notion gêne, en vue de notre
libération.
En effet, si, brutalement, nous avions accès au mystère du
cosmos, qu’adviendrait-il de nous ?
La physique quantique peut imaginer ce que nous pourrions
découvrir si nous n’étions pas limités à la lumière visible, quand la
mythologie grecque nous présente une scène édifiante que nous ne savions plus
lire :
Sémélé, simple mortelle, mère de Dionysos, dont le père n’est autre que Zeus, personnification du cosmos, maître ensemenceur, exige qu’il tienne sa promesse initiale de ne rien lui refuser et de se montrer tel qu’il est dans sa réalité suprasensible. Pris à son propre piège, Zeus s’exécute et Sémélé meurt foudroyée …
5 - Voir note 2.
6 – Quelques peintres de la renaissance savaient encore que
la couleur des habits révélait le degré de spiritualité du personnage.
Désormais, on ne sait plus lire les tableaux de cette manière, mais, très curieusement, l’on
attribue une certaine couleur à telle ou telle partie du cosmos, sachant qu’elle
signifie pour les initiés, un certain type d’activité ...
7- La Bhagavad Gîta
8 - Voir note 2. Des "pelotes" disait en réalité Démocrite, selon les
travaux de Heinz Wismann qui réussit à
enlever la couche félonne, la couche aristotélicienne - ou le maquillage, comme on voudra ! - afin de retrouver le
tableau original composé d'une "matière" toute différente de celle que nous avions imaginée.