Le multivers existe, je l’ai rencontré !

Je sais, ce n’est pas banal, cela peut même paraître prétentieux, car, pour ses partisans les plus avancés, quand bien même ils trépignent d’impatience, il n’est encore qu’une hypothèse !

Mais, si celle-ci se confirmait, pour eux, elle ne signifierait rien moins que la mort de Dieu, proclamée depuis des lustres, comme un vœu pieux, il faut bien le dire ! …

On sait leur raisonnement, né d’un étonnement, d’une sidération serait plus exact : pour résumer quelques milliards d’années en quelques mots, les constantes cosmiques de notre univers ont, selon toute improbable probabilité, et selon un réglage on ne peut plus précis, abouti à la complexité du vivant, grosse de vous et moi !

Fort heureusement, nous venons à la vie sans nous douter jamais de cet étrange mystère, nous épargnant ainsi une très lourde responsabilité que nous ne saurions supporter ! …

Pour tenter de saisir cet enjeu vital, un seul exemple suffira : si l’on modifie un tant soit peu G, la constante de la gravité, point d’étoiles, point de nucléosynthèse, point d’univers, point d’Homme, rien, nothing, nada ! … laissant Dieu à son étrange solitude ! …

Un seul zéro après la virgule vient à manquer, et tout est dépeuplé !

Cette conjonction prolifique est tellement improbable, qu’aux êtres raisonnables que nous sommes devenus, il fallut bientôt une explication plausible !

Pour les uns qui ont toujours eu réponse à tout, avant même que la question ne se pose, à n’en pas douter, il s’agit-là du grand dessein, de la cause finale !

Ces enfants de l’écrit vous le diront : le dieu de la Genèse, glissa à l’oreille de Moïse ces quelques mots qui, pour ne rien dire de l’avant, rien des Elohim, disent tout  de leur irrévocable décision : « Béréshit bara Elohim ! » …

Pour les autres, adeptes du grand livre des comptes de la Française des jeux, ce tirage gagnant suppose à l’évidence des milliards d’autres tirages, ce qu’en d’autres termes, on appelle le multivers ! …

A ce point je dois avouer ma stupéfaction, car les tenants de cette hypothèse, pour des raisons que la raison ignore, à tout le moins la leur, en déduisent par avance la mort de Dieu, n’imaginant pas un instant, qu’au lieu de créer l’univers en sept jours, il aurait pu préférer, lui qui a tout son temps, jouer des milliards de fois, jusqu’à ce qu’un mauvais esprit né sur le tapis vert se barre avec la caisse ?

Une explication peut-être : ils se veulent tellement libres de ce dieu qui ne leur dit décidément rien, qu’ils en ont oublié de se décontaminer du discours de leurs maîtres vénérés : Einstein tout d’abord qui y était allé de son approche négative, affirmant que « dieu ne jouait pas aux dés » ; Occam bien avant lui, la fine lame des fatigués de naissance, des inaptes au labyrinthe, qui se demandait pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?

Ignorant tous les deux, à leur décharge, les infinis scénarios de l’univers infini, comme de l’apparent gâchis de la fort dispendieuse vie sur cette terre, des bébés tortues des Galapagos qui par milliers tentent de rejoindre la mer sous la menace de milliers de becs au regard acéré, aux légions de spermatozoïdes dont un seul parviendra à son but …

Ignorant également la vision d’Héraclite qui ne supporte déjà plus le soi-disant sérieux des adultes, et leur oppose son insoutenable vision : « Dieu est un enfant qui joue ! » …

Il est vrai, que ce dernier ne supportait plus ce que nous étions déjà devenus, et décida de vivre dans un autre univers !

Qui sait si le multivers existe, le saurons-nous jamais ?

Une chose est sûre, c’est que l’univers de ceux qui nous précédèrent à la surface de cette terre, n’est pas le nôtre, j’entends par là, non l’idée qu’il se faisaient de notre commun décor, encore qu’il soit en perpétuelle évolution, mais de leur relation psychique avec cet univers disparu dont le nôtre n’est qu’une métamorphose provisoire.

*

*       *

Pour tenter de se faire une idée de ce monde qui sut s’effacer afin que notre liberté advienne, il me semble intéressant de l’examiner depuis trois angles différents :

Le christianisme est-il antérieur à la naissance de Jésus ?

Sommes-nous momentanément disqualifiés pour envisager l’origine de l’univers ?   

Qui sommes-nous vraiment, Homme terrestre ou Homme cosmique ?

Ces thèmes ne seront ici qu’esquissés, faisant l’objet de différentes approches passées et à venir.

Le christianisme est-il antérieur à la naissance de Jésus ?

Tout le monde est d’accord sur ce point, Jésus de Nazareth est mort dans l’anonymat, ou presque … On ne peut même pas dire « entouré des siens » puisque les douze apôtres avaient fui après s’être endormis au moment où il eut fallu être présents …

Comme nous, ils n’avaient alors rien compris au mystère de celui qui les avait réunis !

Tout autour de la méditerranée sous domination romaine, chacun se délectait par contre des exploits de la figure de l’époque, d’Apollonius de Tyane, prédicateur, thaumaturge, doué d’ubiquité, particulièrement efficace, s’il s’agissait de désigner un bouc émissaire aux fins de régler un conflit qui menaçait de tout emporter  

« Il vaut mieux qu’un seul meure et que la plupart soient sauvés ! », telle était la règle en ce temps-là, et que n’avaient oubliée ni Pilate, ni le Sanhédrin …

Passé aux oubliettes depuis lors, l’essai que lui consacra Bonaparte, décidément sur tous les fronts,  ayant disparu !…

Par la suite, à partir du quatrième siècle, le développement spatial du christianisme fut fulgurant : sitôt reconnu par Rome comme religion officielle, il utilisa bientôt ses anciennes voies pour envahir les cœurs avec l’histoire d’un inconnu, mort prématurément des attentes déçues qu’il avait suscitées dans son pays occupé, bouc émissaire des tensions qui trouvèrent là un exutoire, retardant pour un temps une nouvelle guerre entre les tenants intransigeants du dieu unique et les habiles concepteurs du Panthéon …

Pour ces acteurs obnubilés par la violence de l’autre, la croix fut un leurre, un pis-aller, un reculer pour mieux sauter, car enfin, le sang avait-il eu le temps de sécher avant que le Temple ne soit à nouveau détruit?

Au train où allaient les choses ici-bas, à la bonne nouvelle, la relativité espace-temps s’appliquait déjà, les derniers servis étant ceux qui se situaient aux confins de l’empire …

Parmi ceux-ci, figure l’actuelle Irlande, Hibernia pour les romains …

Que peut-on savoir de la religion de ce peuple avant que les premiers prédicateurs « romains » n’y parviennent par cette voie physique ?

Ce qu’ils purent constater, c’est que pendant ces quelques premiers siècles, le christianisme était présent, étrangement semblable à celui des catacombes pour lequel la bonne nouvelle n’était qu’une confirmation de ce qu’il savait déjà …

Ce mystère qui suppose une information affranchie des règles du temps et de l’espace, bouscule le mensonge simplificateur de l’histoire, et personne désormais ne s’en émeut !

Comment est-ce possible ?

La réponse, oubliée elle-aussi, embarrassante pour l’église romaine, émane paradoxalement de l’un de ses Pères, Augustin d’Hippone (j’ai un peu de mal à dire saint-Augustin, puisque la Rome papale, sans discernement aucun, parle encore à qui ne veut plus en entendre parler, de la sainte Inquisition ! …)

Dans ses confessions, il constate que le Christ était vénéré ici et là, bien avant de s’incarner dans l’homme simple de Nazareth …

En ces temps oubliés, en Hibernie, comme un peu partout ailleurs, quelques hommes empruntaient le long et difficile chemin de l’initiation, de la transformation personnelle, de l’ascèse, pour espérer pouvoir accéder à la lecture du Verbe, au déchiffrement de la volonté des intelligences cosmiques. C’est ainsi que dans les centres des mystères, le drame qui se déroulait en Palestine, ils le vécurent en esprit …

Cet accès direct au mystère du Golgotha, se heurta à la nécessité de l’évolution, à la nécessaire liberté d'y croire ou de ne pas y croire; bientôt les hommes n'y eurent plus accès que par le biais de l’histoire de l’homme simple de Nazareth ...  

 

Sommes-nous momentanément disqualifiés pour envisager l’origine de l’univers ?  

Le Big Bang aura duré quelques dizaines d’années, rejoignant le monde des onomatopées qu’il n’aurait jamais dû quitter ! …

Pour parler du début, on lui préfère désormais le Big Bounce, ce grand rebond qui suppose un avant, aurait suivi une interminable contraction … difficile de se faire une opinion, Socrate n’étant plus là pour nous aider à accoucher de ce que nous ne savons pas savoir …

Les amateurs d’apocalypse, selon au moins ce qu’ils en ont compris, redoutent quant à eux un Big Crunch, un gigantesque collapsus, dont l’effondrement de l’empire romain n’est qu’une insipide mise en bouche, bref, un néant ravalé au rang d’un simple phénomène contingent et qui pourrait bien se produire un jour où l’autre, sachant qu’il s’agit-là sans doute d’un jour de Brahma qui, en son immense mansuétude, nous laisse largement le temps de disparaître …

Après nous le déluge ! …

Né il y a peu, au regard de l’évolution, l’esprit scientifique, toujours adolescent, se construit contre, s’en souvient-il encore ?

Passant par-dessus bord de son frêle esquif, cette forêt mythologique qui pourrait lui faire de l’ombre, les spiritualités orientales qui eurent tort d’avoir raison avant tout le monde, préférant, il est vrai, la clairvoyance qui asservit à la raison qui rend libre, la béatitude, le nirvana, la fuite, au combat du Moi !

Lorsque l’on entend la fine fleur des chercheurs occidentaux s’interroger sur la possibilité d’un Big Bounce, d’un grand rebond, donc d’un précédent, et de fil en aiguille, d’une forme d’éternité instable, qui essayerait telle ou telle forme, dont la matière, ce juge de paix, serait la seule constante, comment s’empêcher de penser au Pralaya des anciens hindous, cette transition entre deux univers où toute manifestation disparaît, où seul l’esprit demeure !

« Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point ! »

L’heure est venue de comprendre cette étrange parole !

Par la bouche de celui qui va bientôt mourir, le Verbe se fait Loi, de celles dont la physique nous dit qu’elles ne sauraient dépendre d’aucun référentiel, fut-ce l’univers !

Depuis la nuit des temps, les hommes savaient, voyaient serait plus exact, que ce que nous appelons désormais la matière n’est qu’une manifestation de l’esprit !

Mais, évolution oblige, nous fûmes bientôt captivés par ce spectacle étrange, et par lui seul ! …

Platon avait bien tenté de nous avertir de différentes manières, jusqu’à créer de toutes pièces le mythe de la caverne, après avoir dit pis que pendre de ces « contes de nourrice », c’est dire si l’enjeu était d’importance, mais c’était déjà peine perdue !…

Peut-être avait-il compris de son vivant qu’il ne pouvait rien contre l’évolution, rien contre cet aveuglement, que la liberté était à ce prix … de guerre lasse, il passa le témoin à son élève, Aristote, qui, s’il pouvait encore concevoir ce qui fut, et mieux que quiconque, pour autant ne voyait plus !

Un peu plus tard, la frontière se précisa, plus hermétique encore, elle passa au sein même d’un homme en guerre contre le monde entier, à commencer par lui-même : Augustin d’Hippone !

Lui non plus, mutatis mutandis, ne voyait plus l’esprit dans cette expression, dans cette forme ultime, qu’avec nos pauvres mots, nous appelons la matière.

Mais, lorsque, à la recherche de la vérité, il concevait encore que ce fut un jour possible, il se fit manichéen, avec l’enthousiasme de ceux qui peuvent encore entendre ce que leur maitre voit, ou dit avoir vu, mais pour finir, frustré, il en revint à cette impossibilité personnelle, à ce moderne doute qui le rongeait, et se résolut à tourner son regard vers le galiléen, comme seule manifestation de l’esprit désormais accessible aux hommes nouveaux !

A ceux dont le Moi toujours plus vaillant effaçait la vision du monde spirituel, mais qui pouvaient reconnaître, une fois la raison établie dans ses droits, apaisée, sa manifestation en l’un des leurs, en ce Jésus de Nazareth dont l’élection, pour être hautement improbable, avait, de manière tout aussi improbable, déjà conquis une grande partie du monde connu …

Il s’en est longuement expliqué dans ses confessions, et La Porte des Lions reviendra longuement sur ce dernier des anciens, sur ce premier des nôtres, sur ses contradictions, sur son fabuleux et chaotique parcours, sur ses allers et retours d’un univers à l’autre, bien avant d’être sacré Père d’une Eglise dépassée par les évènements, mais bien consciente de la menace que faisait peser sur sa justification l’arrivée en force de l’individu ! …

C’est que notre univers se dessinait alors, et le représentant sur terre de son designer s’appelle Pélage, qui refuse au nom des siens, de ces individus qui surgissent à l’horizon de l’histoire, cette vérité qui s’attarde, cette fatalité d’une humanité vue comme un tout, prédestinée, ballottée dans un drame cosmique qui la dépasse, chacun étant embarqué dans une histoire écrite par avance …

En retard d’une époque, contre l’enseignement du galiléen, Augustin, le manichéen mal décontaminé, quoi qu’il en dise, refusa aux nouveaux venus, cette liberté, cette subjectivité, cette responsabilité, et pour tout dire cette âme qui peut, à tout moment, sans intermédiaire, se mettre en relation avec le Verbe qui se fit chair, à ce moment de l’évolution où les hommes étaient justement, nécessairement, livrés à eux-mêmes …

L’Eglise, déjà conservatrice et néanmoins batailleuse se contenta d’un non-choix, d’un « en même temps » conciliaire, d’une approximation paradoxale, qui permettait de tenir deux fers au feu, la prédestination et la responsabilité, mais, qui se souvient de cet enjeu, de cette métamorphose du psychisme, de l’avènement douloureux de ce nouvel univers qui nous semble désormais si familier ?

L’histoire sur laquelle l’Église avait alors la haute main, a retenu qu’Augustin fut son père, lui qui, venu de l’ennemi, lui donna toute puissance, en refusant la moindre parcelle à l’individu …

Il faut dire que ce dernier venu, l’histoire l’a oublié, avait déjà un père, venu lui d’un autre univers, « royaume » disait-il, pour se faire comprendre des siens à l’époque, en la personne du galiléen !

 

Qui sommes-nous vraiment, Homme terrestre ou Homme cosmique ?

Depuis quelques dizaines d’années, notre corps est devenu objet de dévotion, d’un culte nouveau, que l’on peut transporter avec soi, exhiber, faisant preuve en cela d’une étonnante religiosité, sans encourir les rigueurs des ayatollahs de la laïcité ! …

Dans le même temps, certains coureurs de fond, pour qui l’effort de connaître, loin des regards, est une manière de vivre, savent désormais que celui-ci provient des étoiles ! …

Joggeurs bodybuildés ou marathoniens ascétiques, spectateurs attentistes; à chacun, l’époque intime l’ordre de faire le ménage dans ses représentations !

A tout prendre, la poussière d’étoiles est plus valorisante que celle à laquelle on nous promettait hier encore de retourner, quand bien même cet immense avant ne nous exonère pas de ce misérable après !

Pour le dire autrement, ce nouvel objet de culte, résulte d’un drame cosmique qui se joua pendant des milliards d’années au-dessus de nos têtes, quand bien même nous n’en étions pas encore dotés !

Pas moyen d’y échapper, longtemps et injustement méprisée, cette partie de nous-mêmes, a su se rendre indispensable, au point que, comme les épouses ou les esclaves de la haute antiquité, nous avons décidé que nous ne lui survivront pas ! …

Ici, il nous faut réparer un terrible oubli, tenter de reconstituer un univers dont nous n’avons plus la moindre idée, tout comme nous ne savons rien de cette période qui s’étend de notre naissance à nos trois ans, si ce n’est par quelques réminiscences de nos proches qui n’ont jamais rien su de ce qu’il se passait en notre intimité, dont nous-mêmes n’avions pas conscience …

Si nous sommes désormais réduits à douter d’une quelconque réalité de l’âme avant la naissance ou après la mort, il n’en a pas toujours été ainsi ; de nombreuses traditions orales, mises par écrit sur le tard, afin que nul n’en ignore, font état d’un psychisme pour lequel cette question n’aurait eu aucun sens.

En Grèce, l’âme consciente d’elle-même, apparait sur le tard !

Quelque part entre Homère et Socrate …

Pour qui connaît l’Iliade, il est évident qu’Achille n’a pas d’âme, pas plus qu’aucun héros ! …

Sa mort physique lui importe peu, sa proximité non plus, ce qui lui importe, c’est que la gloire acquise sur le champ de bataille contribue à son immortalité ! …

Mais s’ensuit l’Odyssée, affranchie des règles de l’espace et du temps, notre fier-à-bras finit par avouer à Ulysse, de passage aux enfers, que tout bien réfléchi, il vaut mieux être de cette nouvelle race des individus, des besogneux, que roi dans l’Hadès ! …

Avec l’âme qui s’installe dans les représentations, se profile un incessant va-et-vient entre le monde spirituel et le monde d’ici-bas, car celle-ci a manifestement la force d’animer successivement plusieurs personnalités, le Daemon de Socrate en témoigne, mais le prix à payer de cette prise de conscience, c’est la dévalorisation de cette vie, comme il résulta de l’éveil de Bouddha, un peu plus avant, un peu plus loin vers l’orient …

Mais là n’était pas le destin de l’occident, n’en déplaise aux contempteurs de la nécessité, à ces aigris, ces moralistes étriqués, en cette vie privés de chaire, humains, trop humains, ces nouveaux gnostiques qui s’ignorent, qui appellent de leur vœux le multivers, cet univers qui existe déjà dans leur psychisme hasardeux, où tout est relatif, où tout est contingent, où l’Homme est une incongruité qui finira bien par s’auto-détruire * …

*

*        *

 

Celui à qui revint la lourde charge de nous parler de notre origine cosmique, devenue rapidement et durablement doctrinale, désormais inaudible, c’est Aristote !

Devant se résoudre à l’évidence d’un changement d’époque, Platon en avait ainsi décidé !

Le temps en effet était venu de renoncer aux visions confidentielles de quelques initiés cooptés, de confier le déchiffrage des mystères du monde à l’ambitieuse et démocratique logique.

Voici donc ce que fit ce brillant élève de Platon, de ce qu’il n’avait pas vu mais entendu dire, à la lumière de son implacable raisonnement : selon lui, un principe psycho spirituel se détache du monde intelligible pour venir neutraliser un principe psycho corporel déjà actif dans l’embryon humain, prendre le contrôle, s’y individualiser, et poursuivre sa nouvelle vie dans le monde spirituel, une fois débarrassé de ce supplétif provisoire un instant nécessaire …

Il est vrai que dit comme ça, propulsé dans nos actuelles représentations, ça vous a un petit côté Alien !

Cela peut en effet paraître effrayant, comme toute logique dénuée de sentiment, mais avant de fuir par le ricanement, il s’agit de contextualiser, de rendre justice à cet effort d’intégration des enseignements immémoriaux à un contexte psychique qui vient alors d’évoluer…

La connaissance de soi exigée au fronton du temple de Delphes, relayée, et de quelle manière, par Socrate et Platon ; l’âme qui commence à prendre conscience d’elle-même ; l’individu qui bouscule les héros et leur illusion de gloire immortelle, envahit le devant de la scène, réclame plus modestement sa part de salut dans l’au-delà, tout cela n’existait pas au temps d’Homère, tout cela est récent …

En homme de son temps, Aristote applique alors sa logique (qu’il n’a pas songé à déposer, mais que l’occident va exploiter sans vergogne ! …) : l’âme nait de la rencontre de l’esprit et de la matière, du permanent et du provisoire, s’individualise et rejoint sa patrie initiale, forte de ce nouveau statut !

En occident, ce rapport longtemps déséquilibré de l’esprit et de la matière, de l’âme et du corps, prétexte à toutes les dérives monstrueuses, à toutes les imprécations de ceux qui, du haut de la chaire déversaient leur mépris sur la chair mauvaise, nous n’en avons plus souvenir.

En un sens c'est dommage, car cela pourrait bien revenir !

Aristote lui-même avait-il encore souvenir que la Grèce est fille de l’orient, savait-il encore que, longtemps, très longtemps, avant le Bouddha, une science spirituelle, une science de l’âme exacte parce qu’indépendante du témoignage des cinq sens, couplé à la raison, antérieure à cet attelage qui nous emmène toujours plus loin dans la matière et l’illusion, disqualifiait par avance ses spéculations ?

Elle ne décrivait pas l’âme comme il tenta de le faire, comme un résultat, la disséquant, confondant celle-ci avec ses différentes enveloppes, tout comme l’on confond désormais notre daemon avec notre personnalité éphémère, mais éclairait la complexité du réel, la diversité des phénomènes, par la relation mouvante de celle-ci avec la matière, étant entendu que ce que nous nommons ainsi ne saurait la résumer, n’est que le degré inférieur du monde suprasensible, la seule manifestation à notre portée … 

C'est du Sämkhya qu'il s'agit, et il nous faudra revenir à cet univers où l'homme savait encore la relation de l'Un et du multiple ! 

 

 

*Aurélien Barrau estime que si l’humanité n’existait pas, ce ne serait pas un drame ! De là à ce qu’il y ait un lien avec ces milliards d’univers du multivers qu'il appelle de ses vœux et ne débouchent sur rien ! …

D’une certaine manière, il me fait penser à Cioran qui disait qu’un lecteur attentif qui ne se suicidait pas, n’avait rien compris à son œuvre (Précis de décomposition).

 

 

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